RETRAITES ET NATALITÉ : UN LIEN FLOU
Michel Englert ne suit donc pas l’auteur lorsqu’il affirme que la natalité est une solution miracle
aux problèmes des retraites. Le Bureau fédéral du Plan a étudié dans quelle mesure une fécondité
plus forte pourrait répondre au défi démographique que subit notre système de retraites. Il ressort
de cette étude qu’ un relèvement de la natalité de 0,3% sur une période de 50 ans réduit effectivement
l’accroissement du poids budgétaire des pensions (+2,4% au lieu de +3,2%) et du poids budgétaire
des soins de santé (+2,5% au lieu de +3%) mais accroît, d’autre part, les dépenses d’éducation,
d’allocations familiales, etc.Au total le coût budgétaire du vieillissement pour les 50 prochaines
années serait de 3,4% du PIB au lieu de 4,2%). Un relèvement de la natalité serait donc, selon
cette étude, positif pour la Sécurité sociale, mais ne ferait pas disparaître le coût budgétaire du
vieillissement, loin de là.
Selon l’orateur, il faut aussi nuancer le lien direct que David Cosandey fait entre les systèmes de
retraites et la chute de la natalité. Il existe, en effet, plusieurs éléments qui montrent que ce lien
est relativement flou. Les pays scandinaves ont les taux de natalité les moins bas en Europe alors
que leurs systèmes de retraites sont parmi les plus performants. La baisse de la natalité en
Belgique est par ailleurs une tendance longue, bien antérieure au développement d’un système de
retraites. De plus, le moment où le système belge de retraites a été mis en place ne correspond pas
au moment où la natalité en Belgique était la plus faible. La Belgique a même connu une remontée
de la natalité au moment où son système de retraites a été créé : entre 1920 et 1940, la Belgique
a connu des taux de natalité plus faibles que dans la période de l’après-guerre (les années
soixante), période où son système de retraites a été développé.
La baisse de la natalité en Belgique s’inscrit en réalité dans une tendance de long terme qui est
fortement liée, comme l’a d’ailleurs noté David Cosandey, au fait que le coût que représente un
enfant est actuellement plus élevé que dans le passé. Aujourd’hui il faut de gros moyens pour
fonder une famille nombreuse sans tomber dans des conditions difficiles. L’orateur rejoint également
David Cosandey quand il affirme que nous vivons aujourd’hui dans une société de consommation
qui développe l’égoïsme et le consumérisme, ce qui n’encourage pas les gens à fonder une famille.
Mais selon lui, si corrélation il y a entre le développement de ce type de société et la chute de la
natalité d’une part, la mise en place des systèmes de retraite d’autre part, il pourrait y avoir
corrélation entre dénatalité et systèmes de retraite (ce qui reste à démontrer - l’auteur n’a pas
réalisé de tests statistiques), mais sans aucun lien de causalité . Si on supprimait notre système
de retraites par répartition, précise Michel Englert, les gens manifesteraient spontanément un
comportement d’épargne ou de constitution de pension privée qui leur permettrait de faire face à
leurs vieux jours. Cette suppression n’aurait donc pas nécessairement un effet sur la natalité parce
que le niveau de richesse actuelle permet à la majorité des gens de se constituer une épargne en vue
de leurs vieux jours sans devoir compter sur leurs enfants.